Classe pharmacothérapeutique : urologiques ; médicaments utilisés dans les troubles de l'érection, code ATC : G04BE03.
* Mécanisme d'action
Le sildénafil est un traitement oral des troubles de l'érection. Dans des conditions naturelles, c'est-àdire avec une stimulation sexuelle, il restaure la fonction érectile déficiente en accroissant le flux sanguin vers le pénis.
Le mécanisme physiologique responsable de l'érection du pénis implique la libération de monoxyde d'azote (NO) dans le corps caverneux lors de la stimulation sexuelle. L'oxyde d'azote active alors l'enzyme guanylate cyclase, ce qui entraîne une augmentation des concentrations de guanosinemonophosphate cyclique (GMPc) induisant un relâchement des muscles lisses du corps caverneux et favorisant l'afflux sanguin.
Le sildénafil est un inhibiteur puissant et sélectif de la phosphodiestérase du type 5 (PDE5), spécifique de la GMPc, dans les corps caverneux ; c'est à cet endroit que la PDE5 est responsable de la dégradation de la GMPc. Le sildénafil a un site d'action périphérique sur les érections. Le sildénafil n'a pas d'effet relaxant direct sur le tissu du corps caverneux humain isolé, mais il accentue de manière importante les effets relaxants du NO sur ce tissu. Quand la voie NO/GMPc est activée, comme lors d'une stimulation sexuelle, l'inhibition de la PDE5 par le sildénafil entraîne une augmentation des concentrations de GMPc dans les corps caverneux. Par conséquent, une stimulation sexuelle est nécessaire pour que le sildénafil produise ses effets pharmacologiques bénéfiques.
* Effets pharmacodynamiques
Des études in vitro ont montré que le sildénafil était sélectif pour la PDE5 qui est impliquée dans le processus érectile. Son effet est plus puissant sur la PDE5 que sur les autres phosphodiestérases connues. Il y a une sélectivité 10 fois plus importante par rapport à la PDE6, impliquée dans le processus de phototransduction de la rétine. Aux doses maximales recommandées, il y a une sélectivité de 80 fois par rapport à la PDE1 et de plus de 700 fois par rapport aux PDE2, 3, 4, 7, 8, 9, 10 et 11. En particulier, le sildénafil est plus de 4000 fois plus sélectif pour la PDE5 que pour la PDE3, l'isoforme de la phosphodiestérase spécifique de l'AMPc impliquée dans le contrôle de la contractilité cardiaque.
* Efficacité et sécurité clinique
Deux études cliniques ont été conçues spécifiquement afin d'évaluer à partir de quel moment après l'administration et pendant combien de temps le sildénafil pouvait induire une érection en réponse à une stimulation sexuelle. Dans une étude de pléthysmographie pénienne (RigiScan) chez des patients à jeun prenant du sildénafil, le temps médian d'obtention d'une érection suffisante pour un rapport sexuel (60 % de rigidité) était de 25 minutes (intervalle : 12 à 37 minutes). Dans une autre étude avec RigiScan, le sildénafil pouvait encore induire une érection en réponse à une stimulation sexuelle 4 à 5 heures après l'administration.
Le sildénafil donne lieu à des baisses faibles et passagères de la pression artérielle qui, dans la plupart des cas, ne se traduisent par aucun effet clinique. La baisse moyenne maximale de la pression artérielle systolique en position couchée après administration orale de 100 mg de sildénafil était de 8,4 mmHg. Le changement correspondant de la pression artérielle diastolique en position couchée était de 5,5 mmHg. Ces baisses de pression artérielle sont compatibles avec les effets vasodilatateurs du sildénafil, probablement en raison de l'augmentation des concentrations de GMPc dans les muscles vasculaires lisses. Des doses orales uniques de sildénafil allant jusqu'à 100 mg administrées à des volontaires sains ne donnaient lieu à aucun effet cliniquement pertinent au niveau de l'ECG.
Dans une étude portant sur les effets hémodynamiques d'une dose orale unique de 100 mg de sildénafil chez 14 patients présentant une coronaropathie sévère (sténose > 70 % d'au moins une coronaire), la pression artérielle systolique et diastolique moyenne au repos a diminué respectivement de 7 % et 6 % par rapport à la valeur de départ. La pression systolique pulmonaire moyenne a diminué de 9 %. Aucun effet du sildénafil sur le débit cardiaque ni aucune diminution de débit sanguin dans des artères coronaires sténosées n'ont été mis en évidence.
Un essai en double aveugle contrôlé versus placebo, a évalué 144 patients présentant des troubles de l'érection et un angor chronique stable et prenant de manière régulière un traitement anti-angoreux (à l'exception des dérivés nitrés) soumis à une épreuve d'effort. Aucune différence cliniquement significative n'a été mise en évidence entre le sildénafil et le placebo sur le délai d'apparition d'une crise d'angor.
Des différences légères et passagères dans la différenciation des couleurs (bleu et vert) ont été détectées chez certains sujets en utilisant le test Farnsworth-Munsell 100 évaluant la distinction des nuances une heure après l'administration d'une dose de 100 mg ; deux heures après l'administration, plus aucun effet n'était remarqué. Le mécanisme avancé de cette modification dans la distinction des couleurs est lié à l'inhibition de la PDE6, laquelle joue un rôle dans la cascade de phototransduction de la rétine. Le sildénafil est sans effet sur l'acuité visuelle ou la sensibilité aux contrastes. Dans une étude contrôlée versus placebo chez un petit nombre de patients présentant une forme documentée de dégénérescence maculaire précoce (n = 9), le sildénafil (dose unique, 100 mg) n'a montré aucune modification significative lors des tests visuels (acuité visuelle, grille d'Amsler, distinction des couleurs par simulation des feux de circulation, périmètre de Humphrey et photostress).
Aucun effet sur la mobilité ou la morphologie des spermatozoïdes n'est apparu après l'administration par voie orale d'une dose unique de 100 mg de sildénafil chez le volontaire sain.
* Autres informations concernant les essais cliniques
Dans les études cliniques, le sildénafil a été administré à plus de 8000 patients âgés de 19 à 87 ans.
Les groupes de patients suivants étaient représentés : personnes âgées (19,9 %), patients souffrant d'hypertension (30,9 %), de diabète sucré (20,3 %), de cardiopathie ischémique (5,8 %), d'hyperlipidémie (19,8 %), d'une lésion de la moelle épinière (0,6 %), de dépression (5,2 %), d'une résection transurétrale de la prostate (3,7 %), d'une prostatectomie radicale (3,3 %). En revanche, les groupes suivants étaient peu représentés ou exclus des études cliniques : patients ayant subi une intervention chirurgicale au niveau du pelvis ou une radiothérapie, patients présentant une insuffisance rénale ou hépatique sévère et patients présentant certaines affections cardiovasculaires (Cf. rubrique "Contre-indications").
Dans les études à dose fixe, la proportion des patients signalant une amélioration de leurs érections grâce au traitement était de 62 % (25 mg), 74 % (50 mg) et 82 % (100 mg) contre 25 % chez les patients recevant un placebo. Dans les études cliniques, le taux d'interruption du traitement dû au sildénafil était faible et similaire au placebo.
En cumulant toutes les études, la proportion de patients sous sildénafil signalant une amélioration était (par population) de 84 % (troubles érectiles psychogènes), 77 % (troubles érectiles mixtes), 68 % (troubles érectiles organiques), 67 % (personnes âgées), 59 % (diabète sucré), 69 % (cardiopathie ischémique), 68 % (hypertendus), 61 % (résection transurétrale de la prostate), 43 % (prostatectomie radicale), 83 % (lésion de la moelle épinière) et 75 % (dépression). La tolérance et l'efficacité du sildénafil se maintenaient dans les études à long terme.
* Population pédiatrique
L'Agence européenne des médicaments a accordé une dérogation à l'obligation de soumettre des résultats d'études réalisées avec le sildénafil dans tous les sous-groupes de la population pédiatrique pour le traitement des troubles de l'érection (Cf. rubrique "Posologie" pour les informations concernant l'usage pédiatrique).