Classe pharmacothérapeutique : autres médicaments du système nerveux, médicaments utilisés dans la dépendance à l'alcool ; code ATC : N07BB05
* Mécanisme d'action
Le nalméfène est un modulateur du système opioïde avec un profil d'activité différente sur les récepteurs mu, delta et kappa :
- Des études in vitro ont démontré que le nalméfène est un ligand sélectif des récepteurs opioïdes avec une activité antagoniste sur les récepteurs µ et d et une activité agoniste partielle sur le récepteur kappa.
- Des études in vivo ont démontré que le nalméfène réduit la consommation d'alcool, probablement en modulant les fonctions cortico-mésolimbiques.
Des données provenant des études non cliniques, des études cliniques et de la littérature ne suggèrent aucune forme de dépendance ou de consommation abusive éventuelle avec le nalméfène.
* Efficacité et sécurité clinique
L'efficacité du nalméfène sur la réduction de la consommation d'alcool chez des patients présentant une dépendance à l'alcool (DSM-IV) a été évaluée dans deux études d'efficacité. Les patients présentant des antécédents de delirium tremens, d'hallucinations, de convulsions, de comorbidités psychiatriques significatives ou d'anomalies significatives de la fonction hépatique, ainsi que ceux présentant des symptômes de sevrage significatifs à la visite de sélection ou à la visite de randomisation étaient exclus. A la visite de sélection, la majorité (80 %) des patients inclus présentaient une consommation d'alcool à risque élevé ou très élevé (consommation d'alcool > 60 grammes/jour pour les hommes et > 40 grammes/jour pour les femmes selon les niveaux de risque de consommation d'alcool de l'OMS) ; 65 % d'entre eux ont maintenu une consommation d'alcool à risque élevé ou très élevé entre la sélection et la randomisation.
Les deux études étaient randomisées, en double aveugle, en groupes parallèles et contrôlées versus placebo. Après 6 mois de traitement, les patients ayant reçu du nalméfène ont été à nouveau randomisés pour recevoir le placebo ou nalméfène pendant une période supplémentaire de 1 mois. L'efficacité du nalméfène a été également évaluée dans une étude à 1 an, randomisée, en double aveugle, en groupes parallèles et contrôlée versus placebo. Au total, les études incluaient 1941 patients, dont 1144 traités par nalméfène 18 mg selon un schéma posologique dépendant des besoins du patient.
Lors de la visite initiale, l'état clinique, la situation sociale et le mode de consommation d'alcool des patients ont été évalués (sur la base des déclarations du patient). A la randomisation, qui avait lieu 1 à 2 semaines après, le niveau de risque de consommation d'alcool était réévalué et le traitement par nalméfène était initié en même temps qu'un suivi psychosocial (BRENDA) axé sur l'observance au traitement et la réduction de la consommation d'alcool. Le traitement qui était prescrit en fonction des besoins du patient, a entraîné une prise de nalméfène en moyenne un jour sur deux.
L'efficacité du nalméfène a été mesurée sur deux critères principaux d'évaluation : la modification, entre l'état initial et 6 mois, du nombre de jours de consommation excessive par mois (HDD : Heavy Drinking Days) et la modification, entre l'état initial et 6 mois, de la consommation totale d'alcool par jour (TAC : Total Alcohol Consumption). Un jour de consommation excessive (HDD) a été défini comme un jour au cours duquel la consommation d'alcool était > ou = 60 grammes d'alcool pur chez l'homme et > ou = 40 grammes chez la femme.
Une réduction significative du nombre de HDD et de la TAC observée chez certains patients entre la sélection et la randomisation, a été due à des effets non pharmacologiques.
Dans les études 1 (n = 579) et 2 (n = 655), respectivement 18 % et 33 % de la population totale a considérablement réduit sa consommation d'alcool entre la sélection et la randomisation. Parmi les patients présentant une consommation à risque élevé ou très élevé à l'état initial, 35 % se sont améliorés grâce à l'intervention non pharmacologique entre la sélection et la randomisation. A la randomisation, ces patients consommaient une quantité d'alcool si faible, qu'il ne restait qu'une possibilité limitée d'amélioration supplémentaire (effet plancher). Ainsi, les patients qui maintenaient un niveau de consommation d'alcool à risque élevé ou très élevé à la randomisation ont été définis a posteriori comme la population cible. Dans cette population post-hoc, l'effet du traitement était plus important que dans la population totale.
L'efficacité et la pertinence clinique du nalméfène ont été analysées chez des patients présentant une consommation d'alcool à risque élevé ou très élevé aux visites de sélection et de randomisation. A l'état initial, les patients présentaient en moyenne 23 HDD par mois (11 % des patients présentaient moins de 14 HDD par mois) et consommaient 106 grammes d'alcool/jour. La majorité des patients avaient un niveau de dépendance à l'alcool faible (55 % avaient un score entre 0 et 13) ou intermédiaire (36 % avaient un score entre 14 et 21) selon l'Echelle de Dépendance à l'Alcool.
- Analyse d'efficacité post-hoc chez les patients ayant maintenu une consommation d'alcool à risque élevé ou très élevé à la randomisation
Dans l'étude 1, la proportion de patients étant sortis de l'étude était supérieure dans le groupe nalméfène par rapport au groupe placebo (respectivement 50 % versus 32 %). Le nombre de HDD était de 23 jours/mois à l'état initial dans le groupe nalméfène (n = 171) ainsi que dans le groupe placebo (n = 167). Pour les patients ayant poursuivi l'étude et pour lesquels des données d'efficacité à 6 mois étaient disponibles, le nombre de HDD était de 9 jours/mois dans le groupe nalméfène (n = 85) et de 14 jours/mois dans le groupe placebo (n = 114). La TAC était de 102 grammes/jour à l'état initial dans le groupe nalméfène (n = 171) et de 99 grammes/jour à l'état initial dans le groupe placebo (n = 167). Pour les patients ayant poursuivi l'étude et pour lesquels des données d'efficacité à 6 mois étaient disponibles, la TAC était de 40 grammes/jour dans le groupe nalméfène (n = 85) et de 57 grammes/jour dans le groupe placebo (n = 114).
Dans l'étude 2, la proportion de patients sortis de l'étude était supérieure dans le groupe nalméfène par rapport au groupe placebo (respectivement 30 % versus 28 %). Le nombre de HDD était de 23 jours/mois à l'état initial dans le groupe nalméfène (n = 148) et de 22 jours/mois à l'état initial dans le groupe placebo (n = 155). Pour les patients ayant poursuivi l'étude et pour lesquels des données d'efficacité à 6 mois étaient disponibles, le nombre de HDD était de 10 jours/mois dans le groupe nalméfène (n = 103) et de 12 jours/mois dans le groupe placebo (n = 111). La TAC était de 113 grammes/jour à l'état initial dans le groupe nalméfène (n = 148) et de 108 grammes/jour à l'état initial dans le groupe placebo (n = 155). Pour les patients ayant poursuivi l'étude et pour lesquels des données d'efficacité à 6 mois étaient disponibles, la TAC était de 44 grammes/jour dans le groupe nalméfène (n = 103) et de 52 grammes/jour dans le groupe placebo (n = 111).
L'analyse des répondeurs des données poolées des 2 études est présentée ci-dessous.
Résultats de l'analyse poolée des répondeurs chez les patients présentant une consommation à risque élevé ou très élevé à l'état initial et à la randomisation
. Réponse (a) : TAC R70 (b)
Placebo : 19,9 %
Nalméfène : 25,4 %
Odds Ratio (IC 95 %) : 1,44 (0,97 ; 2,13)
p : 0,067
. Réponse (a) : 0-4 HDD (c)
Placebo : 16,8 %
Nalméfène : 22,3 %
Odds Ratio (IC 95 %) : 1,54 (1,02 ; 2,35)
p : 0,040
(a) L'analyse a considéré les patients sortis de l'étude comme non répondeurs
(b) Réponse : réduction > ou = 70 % de la TAC à 6 mois par rapport à l'état initial (périodes de 28 jours)
(c) Réponse : 0 à 4 HDD/mois à 6 mois (périodes de 28 jours)
Des données limitées sont disponibles jusqu'à un mois après l'arrêt du traitement.
- Etude à un an
Cette étude a inclus un total de 665 patients. Cinquante deux pourcent (52 %) de ces patients avaient une consommation d'alcool à risque élevé ou très élevé à l'état initial. Parmi eux, 52 % (représentant 27 % de la population totale) ont maintenu un niveau de risque élevé ou très élevé à la randomisation. Dans cette population cible post-hoc, un plus grand nombre de patients est sorti de l'étude dans le groupe recevant du nalméfène (45 %) que dans le groupe recevant du placebo (31 %). A l'état initial, le nombre de HDD était de 19 jours/mois dans le groupe nalméfène (n = 141) et de 19 jours/mois à l'état initial dans le groupe placebo (n = 42). Pour les patients ayant poursuivi l'étude et pour lesquels des données d'efficacité à 1 an étaient disponibles, le nombre de HDD était de 5 jours/mois dans le groupe nalméfène (n = 78) et de 10 jours/mois dans le groupe placebo (n = 29). La TAC était de 100 grammes/jour à l'état initial dans le groupe nalméfène (n = 141) et 101 grammes/jour à l'état initial dans le groupe placebo (n = 42). Pour les patients ayant poursuivi l'étude et pour lesquels des données d'efficacité à 1 an étaient disponibles, la TAC était de 24 grammes/jour dans le groupe nalméfène (n = 78) et 47 grammes/jour dans le groupe placebo (n = 29).
* Population pédiatrique
L'Agence européenne des médicaments a accordé une dérogation à l'obligation de soumettre les résultats d'études réalisées avec le nalméfène dans tous les sous-groupes de la population pédiatrique pour le traitement de la dépendance à l'alcool (Cf. rubrique "Posologie et mode d'administration" pour les informations concernant l'usage pédiatrique).